L’hospitalité [3/3]

En 2024 les éditions HongFei ont publié deux albums traduits de l’anglais des Etats-Unis : « Je suis un citoyen américain : Wong Kim Ark aux origines des droits du sol » et « Le Goût du cresson » inspiré d’un épisode de l’enfance de son autrice Andrea Wang.

Le premier nous ramène à la fin du 19e siècle, où les Etats-Unis en pleine expansion ont fait appel à une immigration travailleuse. Les parents de Wong Kim Ark, venant de Chine, ont fait partie de ce grand mouvement de population. Pour leur garçon né à San Francisco, malgré le ségrégationnisme ambiant aussi bien dans le commerce que dans les écoles, son pays, c’est l’Amérique. Cette conviction s’est encore renforcée après la visite qu’il a rendu à ses parents rentrés en Chine.

Le deuxième ouvrage nous transporte dans l’Ohio dans les années 1970, où une famille d’origine chinoise traverse, à bord d’une vieille Pontiac, un paysage de champ de maïs. Les parents ayant repéré du cresson dans un fossé ont demandé à leur enfants de les aider à en cueillir. Pour eux, c’est une plante qui les relie à un pays quittés avec regret, tandis que pour leur fille obligée à cette cueillette sauvage, c’est une honte absolue qui entrave son besoin vital de faire comme ses camarades et se fondre dans la société américaine.  

À un siècle d’écart et aux deux bouts du continent américain, ces deux pièces de littérature jeunesse nous touchent tant elles placent au centre du récit une conscience en formation chez les jeunes personnes, et leur expérience d’une identification qui, nourrie du passé de leurs parents, est appelée à évoluer au sein d’un nouveau monde. Si l’hospitalité plus ou moins développée des habitants déjà installés est déterminante pour le sort des parents cherchant à se faire une place comme nouveaux arrivants, elle devient sans objet pour leurs enfants qui sont désormais chez eux et, par conséquent, font partie des hôtes qui accueillent. En matière d’immigration, l’hospitalité n’est pas vouée à se perpétuer et c’est bien ainsi.